Le Serment de 1914, mythe ou réalité, notre insigne

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Le 21 juillet 1914, à 21 heures, les officiers de la promotion MONTMIRAIL baptisèrent leurs bazars.

Écoutez le récit du Serment de 1914 lu par l’EOA Bernard PHILIPPE

Le récit traditionnel

Dans l’après-midi, le “Conseil des Fines de la Très-Bahutée Promotion MONTMIRAIL” avait pris la décision suivante : en raison des circonstances exeptionnelles, la promotion de première année sera baptisée ce soir à 21 heurs devant le coquillard. Le baptême sera simple, militaire, sans aucun cérémonial.

Il n’y eut pas un cri, pas un chant. Dans la nuit tombante devant les “hommes” rassemblés, VOIZARD, le Père Système, dit simplement : “Je vous salue officiers de la CROIX DU DRAPEAU“.

Puis les CROIX DU DRAPEAU s’avancèrent, raidis par l’émotion ; à mesure on distinguait les éclairs pointus des baïonnettes, le balancement des mains gantées de blanc, l’alignement parralèle des casoars que le vent de la course ébouriffait. Les deux promotions se saluèrent et dans un élan se confondirent.

Soudain une pensée folle mais merveilleuse jaillit, une pensée faite de panache, de gloire, de sang : “Jurons, dit ALLARD MEUS, jurons de monter la première fois à l’assaut en casoar et gants blancs. Tous ceux qui étaient présents prêtèrent ce serment” …

Le serment de 1914… Le 22 août 1914 les sous-lieutenants ALLARD MEUS et Alain de FAYOLLE tombaient à la tête de leurs sections : ils s’étaient gantés de blanc et coiffés du casoar pour mourir …  Le serment était tenu …

Un peu d’héraldique : notre insigne promo

L’insigne de la promotion CINQUANTENAIRE DU SERMENT DE 1914, dessiné par François BAURE, reprend cet événement . En 1964, le Vieux Bahut était en ruine et, en dehors de quelques murs en mauvais état, seule la porte principale était encore debout. C’est ce souvenir du Vieux Bahut que François BAURE a représenté.

Certains « p’tits côs » m’ont demandé par « courriels » l’exacte « symbolique » de notre insigne Promo . La voici donc, telle qu’elle fût déposée au 1°semestre 1964,  puis homologuée ensuite en terme héraldique .

Doré et émaillé. Rectangle en métal argenté. Brochant sur le fronton du portail de l’Ecole de Saint-Cyr gravé en creux sur fond d’argent et qui symbolise “l’Ancien Bahut” . Silhouette vue de trois-quarts dos d’un Saint-Cyrien d’or et d’émail noir, le bras droit levé dans le geste du serment. Shako bleu, casoar rouge et blanc, épaulette rouge, gant blanc, attributs traditionnels des Elèves-Officiers.

Le fond du portail, le visage, la vareuse et la partie inférieure de l’insigne sont d’émail noir, rappelant que le serment fut prêté de nuit. En bas à droite les deux dates “1964” et “1914” en chiffres d’or sont disposées de façon à faire ressortir le chiffre “4” qu’elles ont en commun, unissant fermement les promotions à cinquante ans d’intervalle. En bas à gauche, la pointe dirigée vers le haut, épée en relief à garde d’or et lame d’argent.

François BAURE “Manfred”

Le Serment de 14, mythe ou réalité

Le site du Centre de recherche des Ecoles de Coëtquidan propose le texte suivant

En août 1914, la réalité a rattrapé la fiction. Parmi tous les élèves qui se sont succédés à Cyr de 1870 à 1914, nombreux sont ceux qui disparaissent, et avec eux leurs rêves de gloire, dans les tranchées de la Grande Guerre. La guerre de 14, guerre des masses et des hécatombes, ne laisse plus la place à la valeur personnelle des combattants. Quelle déception pour ceux qui autrefois pastichaient Cyrano de Bergerac ! Les sous-lieutenants Meeus et Fayolle de la promotion Montmirail, auteurs des  « Poupées de Cyr », périssent dans l’anonymat des 150 000 morts français d’août 1914. Enfin presque dans l’anonymat ! En tombant au feu, Jean Allard-Meeus est entré dans la légende saint-cyrienne, puisque son nom sera désormais attaché au mythique « serment de 14 ».

Le serment de 14 : mythe ou réalité ?  Certains élèves-officiers ont laissé des témoignages qui ne laissent planer aucun doute : la promotion n’a pas prêté ce serment. Pour le général Humbert, major de promotion de la Montmirail, « Il n’y a pas eu, le 30 juillet 1914, de serment collectif d’aller au combat avec casoar et gants blancs. Il y a eu un cas historique de départ à l’assaut avec casoar et gants blancs. C’est celui d’Alain de Fayolle, de la Croix du Drapeau. Je ne connais aucun camarade qui soit parti au combat avec casoar et gants blanc  ».

Pour le général Jean Regnault, de la Croix du Drapeau, le serment n’a jamais eu lieu sous la forme que lui prête la légende :

« Et le serment ? Les gants blancs ?

Les gants blancs. Nous les avions tous dans la musette car nous savions la vieille tradition de se mettre en gants blancs pour la bataille.

Le serment. Il n’a jamais eu lieu sous la forme que lui prête la légende.

Ce qui s’est passé, je le retrouve dans les historiques de Saint-Cyr car je n’en ai entendu parler que bien plus tard. Dans une chambrée, le soir du baptême, Allard-Meeus et un groupe d’une quinzaine, une vingtaine peut-être, firent serment de mettre casoar et gants blancs pour le premier assaut. Une dizaine de noms sont connus et parmi eux Alain de Fayolle. Il n’est pas parti follement à l’assaut comme on nous l’a représenté, mais sa section éprouvée, arrêtée sous le feu, les hommes plaqués à terre et ne voulant plus se relever, il mit posément son casoar au képi, enfila ses gants blancs et se relevant, leur cria : « Et maintenant allez-vous me suivre ? ». Galvanisés par son sang-froid, ils s’élancèrent ; lui tomba  ».

Seuls quelques élèves de la Montmirail, dont c’était le triomphe, et de la Croix du Drapeau, dont c’était le baptême, ont vraisemblablement prêté ce serment au moment de quitter l’école. Selon le capitaine Albert Paluel-Marmont, « un certain nombre [d’élèves] qui étaient restés groupés autour d’Allard-Meeus – il y avait Alain de Fayolle, de Blottefière, Durosoy, Hachette, de Salins, d’Ampherney, Robert de Saint-Just, Perrault, Poussin, Castelnau, de Brésis, de Rigaud et d’autres – furent pris d’une pensée folle. Oui, dit Allard-Meeus, jurons de monter la première fois à l’assaut en casoar et gants blancs ! Et tous ceux qui se trouvaient la prêtèrent ce serment  ».

Sous-lieutenant au 50e  régiment d’infanterie, Fayolle est tué à Névraumont en Belgique le 22 août 1914, le même jour que son camarade Allard-Méeus et 23 de ses camarades de la Montmirail