Nos très grands anciens : la promotion Croix du Drapeau (1913-1914)
La promotion de la Croix du Drapeau est la 98e promotion de Saint-Cyr (1913-1914) et l’avant-dernière avant la Grande Guerre.
Avec la 99e promotion, dite de la grande revanche (1914), elle reçoit le baptême le . C’est en cette occasion qu’a été prêté le serment de 1914, initié par Jean Allard-Méeus (1891-1914), au cours duquel les tout jeunes Saint-Cyriens auraient fait le serment de monter en ligne en gants blancs et avec leurs casoars.
Mais selon le général Humbert, à ce titre, un seul cas historique a été dûment vérifié : celui d’Alain de Fayolle, qui monta ainsi à l’assaut de sa tranchée, le .
1913-1914-98e-promotion-de-la-croix-du-drapeauNota : en 1980, à les survivants et les veuves de la promotion « Croix du Drapeau » célébraient une messe à l’occasion de leur réunion de promo, soit 66 ans après. Etant stagiaires à l’ESG, nous avons pu les rencontrer à cette occasion et nous faire reconnaître comme leurs petits filleuls.
Nos grands anciens : la Plus Grande France (1938-1939)
Elle a fait l’Histoire de France, notre Histoire.
Ils étaient 500, entrés à Saint Cyr-l’École en 1938 pour deux ans ; dont 12 étrangers : 4 Roumains, 3 Péruviens, 2 Luxembourgeois, un Estonien, un Syrien et un Iranien. Un an après, ils étaient nommés sous-Lieutenants et envoyés au combat.
Notez la similitude, à 25 ans d’intervalle avec la Promotion de la Croix du Drapeau, celle qu’évoque notre nom de Promotion « Serment de 14 », incorporée en 1913 et envoyée au combat en 1914. Deux conséquences pour eux :
• l’une anecdotique : étant nombreux et n’ayant pas vécu la 2° année, ils se connaissaient mal entre eux. Cela n’a pas empêché, jusqu’à maintenant, un attachement à la Promo absolument exemplaire.
• l’autre très grave : ils n’ont pas eu du tout la formation de 2ème année.
Je cite l’un d’entre eux : « Nous avons été très mal instruits, préparant la guerre hippomobile de 1918. Nous avons appris à monter à cheval mais aucun cours de moto ou d’auto, ni technique, ni conduite. Notre formation était du style commando, coups de main, faire des prisonniers ; mais aussi guerre de tranchée, pelle-bêche… Notre habillement et notre armement, à l’exception de l’excellent FM 24-29, étaient ceux de 1918 ».
La grande majorité a rejoint les régiments d’infanterie, mais, ce qui est plus étonnant : 40 rejoint l’Armée de l’Air ; et, si 41 sont allés dans la Cavalerie, les 27 qui ont choisi les chars de combat ont été affectés… dans l’Infanterie.
Dans les conditions que je viens de décrire, et compte tenu d’un équipement et d’un armement désastreux, leur héroïsme n’a pas suffi. Dès 1940, 61 ont été tués et 190 ont été faits prisonniers, c’est à dire la totalité de ceux qui servaient dans les unités d’infanterie. Beaucoup tentèrent de s’évader, certains à plusieurs reprises. 4 y furent tué, une trentaine a réussi.
Ceux qui n’étaient pas – ou n’étaient plus – en captivité, ont combattu dans la Résistance et la France Libre, en Syrie, à Madagascar, en Afrique du Nord, en Italie et dans les campagnes de France et d’Allemagne. 34 tués.
En 1945, beaucoup ont été volontaires pour lutter, en Indochine, contre le Japon puis contre les Viets. 177 y firent un, deux ou trois séjours. 19 d’entre eux sont morts pour la France. Certains ont connu les prisons Viet après Dien-Bien-Phu.
Puis ce fut l’Algérie : 189 y ont été engagés, 5 sont morts au combat.
Au total, la Promo compte 120 Morts pour la France, 17 Morts en Service Commandé. Environ 70 ont été blessés au combat.
Un peu plus de 200 ont quitté l’Armée, en 1945 ou après l’Algérie. Ils ont réussi brillamment leur carrière civile. Parmi ceux qui sont restés, 80 généraux dont trois Généraux d’Armée. Ils se sont par la suite répartis dans divers armes et services, dont 21 dans la gendarmerie. Au moins 7 sont Grands Officiers de la Légion d’honneur, car je ne suis pas sûr que ce chiffre soit à jour.
Je voudrais citer quelques noms, peut-être pas les plus méritants, mais ceux qui se sont distingués d’une manière particulière, héroïque ou originale. Un choix donc très subjectif.
Parmi les morts pour la France :
• Louis de Bettignies : laissé pour mort en 40 ; prisonnier, évadé ; Tunisie, Italie, France ; cinq blessures ; tué en 45 ; nous sommes toujours en contact avec sa veuve, sa fille et son petit-fils.
• Marc Charras : aviateur ; héros de Normandie-Niemen ; abattu en Indochine.
• Jacques Lalande : blessé en 40 ; héros des Glières ; torturé ; assassiné par la milice.
Parmi les autres, et par ordre alphabétique :
• Jacques Barbarin : onze enfants, dont plusieurs religieuses et un cardinal.
• René de Bourmont : jésuite.
• Jacques Chambon : père système ; Commandeur dans cinq ordres nationaux africains.
• Jean-François Clouet des Perruches : Compagnon de la Libération.
• Henri Durteste : moine bénédictin.
• Jean-Paul Etchevery : Général d’Armée ; Gouverneur Militaire de Metz ; auteurs de romans qui ont eu un beau succès de librairie.
• Dimitri de Favitski (vivant) : Ambassadeur de France ; son dernier poste : ambassadeur à Chypre.
• Jean Favreau : Général d’Armée ; Gouverneur Militaire de Paris ; assassiné en Gironde par un voyou qui voulait le voler.
• Robert Granger et Philippe Nicolas (vivant) : ont participé à la grande évasion de l’Oflag 17/A, qui a fait l’objet d’un documentaire vu à la télévision, et qui a inspiré le film américain du même nom.
• Maurice Henry : douze citations ; cinq blessures ; Inspecteur de l’Infanterie, président de la Saint-Cyrienne ; second président de la Promo.
• André Matteï : légionnaire ; héros d’Indochine et en particulier du livre de Paul Bonnecarrère « Par le sang versé » ; lui-même auteur de « Tu survivras longtemps ».
• Georges Mihail : Roumain ; a connu des moments difficiles ; en 2006, peu avant sa mort, il a rédigé un vibrant hommage à sa Promo.
• André Nau : carrière courte ; a consacré 44 ans de sa vie à sa Promo comme secrétaire.
• Lucien Poirier : stratège ; enseignant et écrivain.
• Jacques Richard : secrétaire général de l’UNR ; sénateur ; député.
27/166• Jean Richard : Général d’Armée ; major d’entrée ; a perdu son bras droit en 40 ; a commandé les Écoles de Coëtquidan ; Inspecteur de l’Armée de Terre ; premier président de la Promo.
• Georges Roudier : a perdu son bras droit en 45 à Hanoï contre les Japonais ; Commandant la Région Militaire de Rennes.
• Jean Souriau : a commandé la Promotion « Serment de 14 ».
Ils sont 10, âgés de 96 à 99 ans. Pour le parrainage, nous avons demandé aux deux généraux de division de vous adresser un mot. Les voici.
Je cite le Général Etienne de GRASSET :
» J’ai eu l’occasion de connaître le Capitaine Hervouët en janvier 1952 ; il était alors tout jeune capitaine, au poste prestigieux – et confortable – d’aide de camp du Général Juin, bientôt Maréchal. Il devait incessamment faire son temps de commandement de capitaine pour entamer une brillante carrière ; il demanda au Général Juin, chef du Commandement OTAN Centre Europe, d’appuyer ses démarches pour obtenir non pas une unité blindée OTAN, mais l’unique escadron de chars M24 en opération au Vietnam. A Dien Bien Phu, il y rencontra la gloire et la mort au Champ d’Honneur. »
Je cite le Général Jean NOS :
» Comme vous la Promo Capitaine Hervoët, notre Promo de la Plus Grande France était animée de la même ardeur à servir la France. Nous avons été nommés sous-Lieutenants à un an d’école et envoyés immédiatement faire la guerre contre l’Allemagne. Nous avons pris en 1940 une raclée terrible en Belgique, mais avons participé à la victoire de 1945 puis aux guerres d’Indochine et d’Algérie.
Votre promo aura sans doute – mais on ne sait pas – une existence plus tranquille que la nôtre. Comme la « Plus Grande France », vous n’agrandirez pas notre territoire mais servirez avec honneur et fidélité. »
2020 : Dimitri de Favitski vient de mourir. Ainsi s’éteint la “Plus Grande France”.
Nos filleuls : la promotion Général Delestraint (1988-1991)
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Mars 2016 : le jumelage des promotions