Adieu à la promotion Plus Grande France

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Bonjour, chers petits cos.
Dimitri de Favitski vient de mourir. Ainsi s’éteint la “Plus Grande France”.
L’an dernier, nous avions dissout l’association et Jacques avait réglé les comptes.

La Promotion de la Plus Grande France a écrit une page majeure de l’histoire de notre pays en faisant la guerre sans interruption pendant 26 ans, de 1939 à 1965.

Ils étaient 500, entrés à Saint Cyr l’École en 1938 pour deux ans ; dont 12 étrangers : 4 Roumains, 3 Péruviens, 2 Luxembourgeois, un Estonien, un Syrien et un Iranien.

Un an après, ils étaient nommés sous-Lieutenants et envoyés au combat. Par une ironie de l’histoire, ils vivaient, 25 ans après, ce qu’avaient connus leurs anciens de la Promotion de la Croix du Drapeau, incorporés en 1913 et envoyés au combat en 1914, prestataires de ce “Serment de 14” qui nous a donné notre nom de Promo.

Première conséquence de cette sortie d’École anticipée : ils se connaissaient peu entre eux, ce qui n’a pas empêché, pour la plupart, un attachement viscéral à leur Promo jusqu’à la fin, autour de trois présidents charismatiques et de deux secrétaires acharnés. La deuxième conséquence est plus grave : ils n’ont pas eu du tout la formation de deuxième année. Citons l’un d’entre eux : “Nous avons été très mal instruits, préparant la guerre hippomobile de 1918. Nous avons appris à monter à cheval mais aucun cours de moto ou d’auto, ni technique, ni conduite. Notre formation était du style commando, coups de main, faire des prisonniers ; mais aussi guerre de tranchée, pelle-bêche… Notre habillement et notre armement, à l’exception de l’excellent FM 24-29, étaient ceux de 1918“.

La grande majorité a rejoint les régiments d’infanterie, mais 40 rejoint l’Armée de l’Air, 41 la Cavalerie. Et les 27 qui ont choisi les chars de combat ont été affectés… dans l’Infanterie.

Dans les conditions décrites ci-dessus, leur héroïsme n’a pas suffi. Dès 1940, 61 ont été tués et 190 ont été faits prisonniers, c’est à dire la totalité de ceux qui servaient dans les unités d’infanterie. Beaucoup tentèrent de s’évader, certains à plusieurs reprises. 4 y furent tué, une trentaine a réussi.

Ceux qui n’étaient pas – ou n’étaient plus – en captivité, ont combattu dans la Résistance et la France Libre, en Syrie, à Madagascar, en Afrique du Nord, en Italie et dans les campagnes de France et d’Allemagne. 34 ont été tués.

En 1945, beaucoup ont été volontaires pour lutter, en Indochine, contre le Japon puis contre les Viets. 177 y firent un, deux ou trois séjours. 19 d’entre eux sont morts pour la France. Certains ont connu les prisons Viet après Dien-Bien-Phu.

Puis ce fut l’Algérie : 189 y ont été engagés, 5 morts au combat.

Au total, la Promo compte 120 Morts pour la France, 17 Morts en Service Commandé. Environ 70 ont été blessés au combat.

Un peu plus de 200 ont quitté l’Armée, en 1945 ou après l’Algérie. Ils ont réussi brillamment leur carrière civile. Parmi ceux qui sont restés, 80 généraux dont trois Généraux d’Armée. Ils se sont par la suite répartis dans divers armes et services, dont 21 dans la gendarmerie. Il n’est pas excessif de dire qu’ils se sont couverts de gloire ; le nombre de leurs décorations et citations est impossible à donner sans risque d’erreurs.

Selon un choix subjectif et injuste, voici quelques noms, non pas des plus méritants, mais de ceux qui se sont distingués de manière héroïque ou simplement originale.

– Jacques Barbarin : onze enfants, dont plusieurs religieuses et un cardinal.

– Louis de Bettignies : criblé de balles et laissé pour mort en 1940 ; prisonnier, évadé ; Tunisie, Italie, France ; cinq blessures ; mort pour la France en 1945.

– Maurice Bourgeois : major de sortie, porte-drapeau, premier président de la Promo (1952-1975).

– René de Bourmont : jésuite ; aumônier de la Promo.

– Jacques Chambon : père système ; Commandeur dans cinq ordres nationaux africains.

– Marc Charras : aviateur ; héros de Normandie-Niemen ; abattu en Indochine, mort pour la France.

– Jean-François Clouet des Perruches : Compagnon de la Libération.

– Henri Durteste : moine bénédictin.

– Jean-Paul Etchevery : Général d’Armée ; Gouverneur Militaire de Metz ; auteurs de romans qui ont obtenu un beau succès de librairie.

– Dimitri de Favitski : ENA, Ambassadeur de France ; a terminé sa carrière comme ambassadeur à Chypre ; le dernier mort de la Promo, le 22 janvier 2020.

– Jean Favreau : Général d’Armée ; Gouverneur Militaire de Paris ; assassiné en Gironde par un voyou.

– Robert Granger : a participé, avec Philippe Nicolas, à la grande évasion de l’Oflag 17/A, qui a fait l’objet d’un documentaire vu à la télévision, et qui a inspiré le film américain du même nom.

– Etienne de Grasset : une fidélité exemplaire à sa Promo jusqu’à sa mort à 99 ans.

– Maurice Henry : douze citations ; cinq blessures ; Inspecteur de l’Infanterie, président de la Saint-Cyrienne ; troisième président de la Promo (1992-2014).

– Octave Labussière : Premier trésorier de la Promo (1946-1992).

– Jacques Lalande : blessé en 1940 ; héros des Glières ; torturé ; assassiné par la milice, mort pour la France.

– André Matteï : légionnaire ; héros d’Indochine et en particulier du livre de Paul Bonnecarrère “Par le sang versé” ; lui-même auteur de “Tu survivras longtemps”.

– Georges Mihail : Roumain ; a connu des moments difficiles ; en 2006, peu avant sa mort, a rédigé un vibrant hommage à sa Promo.

– André Nau : carrière courte ; deuxième secrétaire de la Promo (1975-2013).

– Philippe Nicolas : a participé à la “grande évasion” avec Robert Granger (voir à ce nom).

– Jean Nos : A 96 ans, donnait des conférences, écrivait pour la Promo et la St Cyrienne.

– Lucien Poirier : stratège ; enseignant et écrivain.

– Jacques Richard : secrétaire général de l’UNR ; sénateur ; député.

– Jean Richard : Général d’Armée ; major d’entrée ; a perdu le bras droit en 1940 ; a commandé Coëtquidan ; Inspecteur de l’Armée de Terre ; deuxième président de la Promo (1975-1992).

– Georges Roudier : a perdu le bras droit en 1945 à Hanoï contre les Japonais ; Commandant la Région Militaire de Rennes.

-Christian Sandrin : deuxième trésorier de la Promo (1992-2002).

– Jean Souriau : a commandé la Promotion “Serment de 14” (1963-65).

– Paul Taro : quatorze citations ; héros d’Indochine (3 séjours) ; mort pour la France à la tête du Bataillon de Marche Indochinois en 1953.

Jacques Vilcoq : premier secrétaire de la Promo (1946-1975).

La Promotion de la Plus Grande France a été marquée dans sa chair, par ses morts pour la France, par ses blessés. Elle l’a été tout autant dans son âme. Lancée dans la tourmente de 1940 sans préparation et sans équipement, elle a subi, malgré son héroïsme, l’humiliation des camps allemands. Engagée ensuite dans des guerres mal soutenues par la Nation, elle n’a pas reçu les marques de reconnaissances qui lui étaient dues. Malgré cela, seuls ou soutenus par des épouses admirables, nos anciens ont continué à servir dans l’honneur et la foi en notre pays, exemples et symboles toujours vivants de ce qui fait la France encore plus grande.

Jacques DELAIGUE et Bernard PHILIPPE.

Le mot du Père Système

Ainsi va la vie….. Cette extinction me touche aussi d’assez près. J’ai été – selon les périodes – assez lié avec certains d’entre eux : Henry , Naud bien sûr, de Grasset,…
A chacune de leurs réunions promos auxquelles j’ai assisté avec Marie-Françoise, nous avions droit à un banc d’honneur ” les Petits Célérier” !
Ce fut une grande et belle promotion; ils sont tous maintenant au grand calme du paradis des Cyrards, où nous les rejoindront inévitablement.
Un grand merci à vous deux Bernard et Jacques, pour les avoir accompagnés jusqu’au bout. Je sais qu’ils vous en étaient très reconnaissants.

Le message de Paul GEZE, Père système de la Delestraint

Chers parrains et bazar,

Avec tous les officiers de la promotion Général Delestraint, nous nous associons à la peine de voir s’éteindre une promotion marraine.

Toutefois, si, comme vous l’écrivez Philippe dans le mot du Père Système, ils ont rejoint le grand calme du paradis des Cyrards, il n’en demeure pas moins que leurs exploits sont inscrits dans notre histoire et que cette promo peut encore être évoquée comme faisant partie de celles qui ont participé à la libération de notre pays.

J’ai encore en mémoire les mots d’André Nau évoquant, le jour de notre parrainage, ses camarades disparus dans la tourmente des années 40-45 puis en Indochine. Cela a marqué le jeune officier que j’étais à l’aube de ma carrière militaire.

J’imagine que quelques veuves vivent encore. Nous sommes en mesure de vous aider à maintenir le contact avec elles.

Bien cordialement,

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